
Choc dans l’industrie du vélo : Giant frappé par une sanction historique aux USA
27 septembre 2025Le premier fabricant mondial de vélos, Giant, fait face à une interdiction d’importation immédiate aux États-Unis. Washington accuse le géant taïwanais de recourir au travail forcé dans ses chaînes de production. Les conséquences pourraient être lourdes pour la marque, ses clients, et l’ensemble du marché du cycle.
Giant ciblé par une interdiction d’importation sans préavis
Le 24 septembre dernier, les douanes américaines (CBP – Customs and Border Protection) ont annoncé une mesure radicale à l’encontre de Giant : la mise en place d’une Withhold Release Order (WRO), un outil juridique qui bloque l’entrée de tout produit suspecté d’être fabriqué via le travail forcé.
Giant, reconnu comme le premier fabricant mondial de vélos, voit ainsi ses vélos, pièces détachées et accessoires produits à Taïwan interdits d’accès au marché américain. Un coup dur pour une marque qui réalise une part importante de ses ventes en Amérique du Nord.
Selon les autorités américaines, la décision repose sur des « signes raisonnables » d’abus constatés dans l’usine taïwanaise du groupe. Les faits reprochés incluent :
- Abus de vulnérabilité de travailleurs étrangers
- Rétention illégale de salaires
- Conditions de vie et de travail dégradantes
Les douanes accusent Giant d’avoir profité de ces pratiques pour produire à moindre coût, au détriment des entreprises américaines et des droits fondamentaux des travailleurs.

Une suspicion ancienne déjà documentée
Ce n’est pas la première fois que Giant est mis en cause pour des pratiques douteuses. En février 2025, une enquête approfondie publiée par Le Monde avait levé le voile sur les pratiques de recrutement dans plusieurs usines taïwanaises du secteur, dont celle de Giant.
Le rapport mettait en lumière l’implication de courtiers privés, intermédiaires spécialisés dans le recrutement de main-d’œuvre étrangère. Leur méthode : imposer aux travailleurs migrants des frais de recrutement exorbitants, pouvant atteindre jusqu’à 5 600 €, auxquels s’ajoutent des prélèvements mensuels récurrents sur les salaires.
Bien que cette pratique soit légale à Taïwan, elle est de plus en plus critiquée à l’international et considérée comme une forme moderne de servitude.
Les conséquences immédiates pour Giant et ses clients américains
Cette décision des douanes américaines a un impact direct sur les opérations de Giant. En l’absence d’importation possible, plusieurs modèles populaires risquent de disparaître temporairement des stocks des distributeurs américains.
Les répercussions pourraient s’étendre à :
- La gestion du service après-vente (SAV), désormais menacée par un manque de pièces détachées
- Des retards de livraison pour les nouveaux modèles
- Une potentielle hausse des prix sur les modèles restants en circulation
Pour les cyclistes américains, cette crise pourrait se traduire par une rupture de disponibilité sur certains produits emblématiques de la marque. À plus long terme, cela pourrait impacter l’image de Giant à l’échelle mondiale.

Giant répond aux accusations
Face à l’ampleur du scandale, Giant n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué officiel, le groupe indique avoir déjà mis en place plusieurs mesures correctives pour se conformer aux normes internationales.
Parmi les actions entreprises :
- La prise en charge complète des frais de recrutement des travailleurs étrangers
- Une amélioration des conditions de logement dans les dortoirs de l’usine
- La mise en place d’une charte éthique de production supervisée par un audit externe
Le groupe taïwanais regrette par ailleurs de ne pas avoir été informé en amont de la décision américaine. Selon ses représentants, aucune notification ni demande de correction n’a précédé la WRO, ce qui place Giant dans une situation délicate pour réagir rapidement.
Un marché du cyclisme fragilisé dans le monde
Cette affaire tombe au plus mauvais moment pour l’industrie du vélo, déjà fragilisée par des droits de douane élevés, des tensions géopolitiques, et une baisse relative de la demande après le boom du vélo post-Covid.
Giant, fournisseur de nombreuses marques mondiales en OEM, joue un rôle clé dans l’équilibre du marché international. Le blocage américain pourrait entraîner un effet domino sur les chaînes d’approvisionnement globales, notamment en Europe, où certaines pièces proviennent des mêmes usines taïwanaises.
Pour les distributeurs français, le risque de perturbations existe aussi, même si le marché hexagonal n’est pas encore directement concerné par l’interdiction. Certains acteurs anticipent déjà des retards dans les livraisons de la saison 2026.
Un rappel brutal de l’importance des conditions de production
L’affaire Giant met en lumière les enjeux liés à l’éthique des chaînes de production mondialisées. À l’heure où les marques valorisent leur engagement RSE (responsabilité sociétale des entreprises), de telles révélations peuvent rapidement entacher leur réputation.
Les consommateurs sont de plus en plus attentifs à l’origine des produits, et à la manière dont ils sont fabriqués. Une tendance qui pourrait s’accentuer avec l’adoption de réglementations plus strictes sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de droits humains.
Les ONG et syndicats internationaux appellent désormais à un renforcement des contrôles dans le secteur du cycle, souvent peu surveillé malgré ses volumes de production importants.
Début d’une guerre commerciale pour l’ensemble du secteur ?
Giant, qui a bâti sa réputation sur la qualité de ses vélos et son innovation technologique, se retrouve aujourd’hui face à un défi de taille : reconstruire sa crédibilité sur les marchés occidentaux tout en régularisant ses pratiques internes.
Alors que l’enquête américaine se poursuit, d’autres marques pourraient être concernées dans les mois à venir. Cette affaire pourrait bien marquer un tournant dans la façon dont l’industrie du vélo est régulée à l’échelle mondiale.
Pour l’heure, Giant joue la transparence et multiplie les annonces, mais le chemin vers une réhabilitation complète s’annonce compliquée. L’industrie du vélo était jusqu’alors plutôt épargné par les conflits en cours. Mais cette première sanction risque de lancer une guerre commerciale dans le secteur.
Crédit photos Giant

Je suis le rédacteur en Chef de Volto Vélo. Fondateur du site, je suis un adepte du VTT électrique. Je me tiens également au courant de toute l’actualité du vélo électrique urbain.